Ma ligne de chance : John Keating et les émotions
Ma ligne de chance : John Keating et les émotions

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lundi 16 octobre 2017
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4 minutes pour aborder les plus grandes répliques du cinéma: vous êtes bien dans Ma ligne de chance, sur Radio Campus Paris. Nous nous tournons aujourd'hui vers un film culte, pleins d'émotions, Dead Poets Society, Le Cercle des Poètes Disparus, de Peter Weir.

« But poetry, beauty, romance, love, these are what we stay alive for ». « Mais la poésie, la beauté, les passions, l’amour, voilà ce pour quoi nous restons en vie. » Cette réplique de Robin Williams nous a donné à penser, et voici notre interprétation, subjective bien sûr, de cette trouvaille du scénariste Tom Schulman.

A quoi ressemble un cours de John Keating:

https://www.youtube.com/watch?v=_n_tKXneXh8

Tout le monde se souvient de l’emblématique John Keating, joué par un Robin Williams grimé en professeur de littérature hétérodoxe. Dans ses cours, il promeut une approche vivante de la poésie. On ne peut pas comprendre un poème en le découpant ; la poésie, ça ne se rationalise pas : ça se vit, se sent, s’éprouve.

Et c’est à l’aune de cette idée directrice de Keating que nous allons pouvoir analyser sa célèbre réplique. Elle est prononcée alors qu’il annonce à ses élèves qu’il va leur dévoiler un secret. Le voici : sans art, sans amour, notre vie n’aurait aucun sens. On pense à Nietzsche, qui affirmait dans Le Crépuscule des idoles que sans musique, la vie serait une erreur.

Mais plus encore : ce n’est pas seulement que la poésie, l’amour, les émotions, constituent le sens de notre vie ; c’est surtout qu’ils sont l’horizon qui nous pousse à continuer à vivre. Et en ce sens, il faudrait rapprocher la réplique de Keating de la philosophie de Spinoza plutôt que Nietzsche. Spinoza dans l’Ethique, nous dit que chaque être vivant s’efforce de persévérer dans son être, dans sa nature. Cet effort, c’est le conatus.

Le conatus ce n’est pas seulement rester en vie, conserver son être – ce qui n’est qu’un instinct de survie. Le conatus, c’est avant tout un effort pour augmenter son être, vivre plus intensément. Mais il ne s'agit pas de vivre plus intensément en termes de quantité, à savoir vivre plus d’expériences, etc. Au contraire, il s'agit de vivre plus intensément en termes de qualité, c'est-à-dire vivre mieux la vie que l’on mène, être plus proche de soi, de sa nature.

Pour Keating, l’art, l’amour, les émotions, tout cela est bien ce vers quoi on fait effort. Notre métier, c’est ce qui nous permet de rester en vie – de conserver notre être. Et Keating n’est pas caricatural : il affirme bien la nécessité d’apprendre un métier pour gagner de l’argent et ainsi subvenir à ses besoins. Mais en même temps, il ne faut pas oublier que l’art et les sentiments, c’est avant tout ce qui nous donne envie d’augmenter notre vie, et de se sentir de plus en plus vivant.

Médecins, juristes, salariés, tous, considérez ainsi votre existence : et vous découvrirez que si vous la conservez, si vous cherchez à l’améliorer, ce n’est pas pour avoir plus de confort : c’est pour éprouver de l’amour, des passions, pour contempler la beauté, pour écouter la poésie. Vivre pour les émotions, voilà la valeur de tout homme.

Les références de l'émission:

Pour aller plus loin:

Ma ligne de chance
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