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Ma ligne de chance : Les Tontons Flingueurs et les cons

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lundi 30 octobre 2017
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4 minutes pour aborder les plus grandes répliques du cinéma, vous êtes bien dans Ma ligne de chance sur Radio Campus Paris. On redécouvre aujourd’hui un classique des classiques, Les Tontons Flingueurs, de Georges Lautner. C'est une célèbre phrase de Lino Ventura sur les cons que nous allons analyser.

« Les cons, ça ose tout ; c’est même à ça qu’on les reconnaît. » Cette réplique de Lino Ventura nous a donné à penser, et voici notre interprétation, subjective bien sûr, de cette trouvaille du dialoguiste Michel Audiard.

https://www.youtube.com/watch?v=HmI6co3ensE

Fernand Naudin, joué par Lino Ventura, est persuadé que les frères Volfoni viennent de tenter de le tuer. En conséquence, il est allé se venger par un coup de poing bien placé dans la tête de Raoulf Volfoni, joué par Bernard Blier. Naudin, chez lui, se demande si les Volfoni vont venir jusqu’à son domicile. C’est la raison de sa célèbre réplique.

Alors comment l’aborder ? « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. » Ce n'est pas une définition du con par sa nature, par ce qu’il est. C'est une définition du con par ses actes, par ce qu’il fait. Et en ce sens, on peut penser à ce que dit Sartre dans L’existentialisme est un humanisme : « L’homme n’est rien d’autre que son projet, […] il n’est rien d’autre que l’ensemble de ses actes. » Ici, le con est un audacieux téméraire : il a de l’audace – il « ose » – mais il en a trop – il ose « tout ». Il ne sait pas limiter son audace, qui est irréfléchie.

Le con ressemble au téméraire du dialogue de Platon, Lachès, qui ne sait pas battre en retraite du champ de bataille. Or le vrai courageux, celui qui possède une audace réfléchie, ne se jette pas à corps perdu dans toutes les combats. Si bien que le con est un téméraire qui ne comprend les limites : il manque d’à-propos. Il ne sait pas ne pas oser.

Mais cette réplique de Lino Ventura nous indique autre chose d’important. En effet, non seulement le con se définit par ses actes, mais il est reconnu grâce à ses actes. Reconnu – et non pas connu. C’est à chaque une nouvelle connaissance que l’on acquiert lorsque l’on voit le con agir. On ne peut pas le reconnaître avant qu’il ait « osé tout ». La nature du con est une vérité a posteriori, après l’expérience. Ainsi, le con montre à chaque fois, à chaque nouvelle audace irréfléchie, qu’il est un con. La connerie ne se manifeste que dans l’acte irréfléchi supplémentaire.

La réplique est riche : car ce ne sont pas les Volfoni qui ont tenté de tuer Naudin. Donc, l'ironie qui se cache dans la réplique se retourne contre Lino Ventura. Et lui-même finit par apparaître comme un con. Et en définitive, nous sommes tentés, à la lumière de cette analyse, de revoir Les Tontons Flingueurs, pour redécouvrir des dialogues qui n’ont pas pris une ride.

Les références de l'émission:

Pour aller plus loin:

Sur l'homme qui se définit par ses actes (son existence) et non par ce qu'il est (son essence), L'Être et le Néant de Sartre

A propos de la distinction entre témérité, courage et lâcheté, Ethique à Nicomaque d'Aristote, surtout le livre III.

Quant à la reconnaissance comme une connaissance nouvelle, L'Irréversible et la nostalgie de Jankélévitch sur le retour d'Ulysse à Ithaque.

Ma ligne de chance
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