L'édito de Victor : « Quelle c*nne je fais ! »
L'édito de Victor : « Quelle c*nne je fais ! »

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Magazine
Société
mardi 11 octobre 2022
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En rentrant de vacances, Victor a rouvert Twitter et Instagram. Bien mal lui en a pris : 10 minutes plus tard, il avait déjà envie de casser son téléphone contre un mur...

...oui parce qu'on peut avoir grandi en se sachant une petite pédale et avoir parfois la gestion émotionnelle d’un bully préadolescent. Donc je voudrais ce soir vous parler de deux sujets qui m’ont particulièrement soulés.

Premier agacement. Sur Twitter la maléfique, plusieurs comptes de meufs, ont lancé un débat qui disait en substance « hey les cis gays vous êtes des gros misogynes parce que vous vous genrez au féminin pour dire des choses négatives ». Bon, la question se pose je suis d’accord, on en a même parlé récemment avec les membres de cette équipe hors antenne. Mais Twitter oblige, tout était ici dans la mesure et aucune ne tentait d’esquisser l’ombre d’une explication. Alors moi je vais vous en livrer quelques unes.

Premièrement quand on a été, comme c’est le cas pour beaucoup de gays, genré par les autres au féminin pendant une bonne partie de son enfance et adolescence - et évidemment pas pour chanter les louanges de nos qualités de sportives - on a bien le droit à l’âge adulte de se genrer au féminin, même si c’est pour dire des choses négatives. C’est un retournement de stigmate, c’est de l’empouvoirment.

Deuxièmement, c’est une pratique qui se retrouve majoritairement dans des groupes, et OH WAIT, souvent ils sont constitués de gens qui subissent ou ont subi la même oppression. Donc en plus de retourner cette oppression ils en font une force collective.

Et troisièmement c’est une pratique que les pédés n’utilisent qu’ENTRE EUX. Avez-vous déjà entendu un gay dire « mon boss est une grosse conne » ou « mon daron, quelle boufonne » ? A priori, non. Et pourquoi ? parce qu’on utilise toujours le féminin pour qualifier des membres de la commu et très souvent d’ailleurs des gens qu’on apprécie. Si c’était dans une intention misogyne ce serait appliqué à TOUS les hommes sur qui on bitch.

Mon deuxième ulcère a été provoqué par une story qui a beaucoup tourné sur insta et qui se gargarisait d’apporter une définition de la queerness somme toute assez confondante de prétention. On pouvait y lire d’abord que « mettre du vernis le weekend et revenir au travail habillé normalement le lundi ne fait pas de vous un queer », OK, merci de donner les bons et mauvais points René, n’hésite pas à partager le barême la prochaine fois. Ensuite il y avait écrit qu’être queer c’est s’être déjà senti mal à l’aise dans, je cite, un « lieu fréquenté par des mec gay physiquement plaisants ». Putain, quelle conne je fais, je pensais qu’être queer c’était se sentir en décalage par rapport à la cishétéronormativité et en fait rien à voir, c’est être en décalage avec les mecs gays sexy.

Il y a des soirées où 12 bombes atomiques torses nus se zieutent le nombril dans un coin et où le reste de la basse cour regarde en sachant qu’il ne les toucheront jamais, ben juste moi j’y vais pas à ces soirées, mais c’est un choix. Ca veut pas dire que ce sont des bad gays, que les gens qui y vont ne sont pas assez pédés ou pas assez queer. Et dans l’autre sens m’y sentir mal à l’aise ne fait pas non plus de moi in extenso un queer. Vous aurez donc saisi que j’ai trouvé cette définition tout à fait grotesque…

Ce qui est le plus agaçant c’est que ces deux petites histoires, ont pour moi la même finalité. En pointant l’autre du doigt, en quête du badge de la meilleure militance, elles prennent le risque de faire imploser la commu juste pour savoir « who’s the perfect queer of all ».

Et quand on joue trop longtemps à miroir qui est la plus belle, à la fin, on finit par réclamer le cœur de Blanche-Neige.

Chronique : Victor Samoth-Panetti